Distribution de la presse, services postaux, arrêt du réseau cuivre, complétude et qualité de la fibre, réduction de l’impact environnemental du numérique… Année après année, l’autorité de régulation voit s’allonger la liste des domaines qui lui sont confiés.
Déverrouiller les écosystèmes numériques
Cette tendance ne va pas s’arrêter en 2024. Car comme l’a expliqué Laure de La Raudière à l’occasion des vœux de l’Arcep le 23 janvier, l’autorité va hériter de plusieurs dossiers imputables au « tsunami de textes européens » sur le numérique de ces derniers mois : Data Governance Act, Data Act, Data Market Act, Artificial intelligence Act… Des textes qui « visent à déverrouiller des écosystèmes numériques […] où le jeu concurrentiel n’est pas loyal », a-t-elle souligné. L’autorité va ainsi être amenée à imposer des règles d’interopérabilité aux plateformes de cloud pour faciliter le changement de prestataire et tenter de mettre fin à l’oligopole américain. Un rôle d’arbitre que doit lui conférer la loi sur la régulation de l’espace numérique. L’adoption définitive de la loi SREN reste cependant soumise à la tenue d’une commission mixte paritaire annoncée pour début février et à un accord avec la Commission européenne, Paris ayant eu à répondre à plusieurs salves de critiques de Bruxelles selon la presse spécialisée.
Désignation des intermédiaires de données
L’Arcep va également devoir désigner les « intermédiaires de données » créés par le Data Governance Act. Pour doper les usages innovants, ces nouveaux acteurs doivent faciliter la réutilisation de données publiques et privées, voire de données personnelles anonymisées selon un principe « d’altruisme des données ». Un rôle d’intermédiation qui intéresse plusieurs collectivités, a noté la récente mission data et territoires (voir notre article) même si le texte européen imagine plutôt des acteurs privés pour jouer le rôle. « Sur l’intermédiation de données, nous allons établir rapidement un plan d’actions concerté et échanger entre régulateurs européens pour retenir une définition des critères la plus harmonisée possible. Notre ambition est de permettre une labellisation des acteurs dans les meilleurs délais », a promis Laure de La Raudière.
Cuivre et fibre toujours
Cette charge de travail devra être absorbée alors que l’autorité doit encore gérer plusieurs gros dossiers liés à ses missions historiques, au premier rang desquels la fermeture du cuivre et la couverture THD. Sur le cuivre, la présidente a appelé « chacun à jouer son rôle » alors que « la fermeture du réseau cuivre devient perceptible sur tous les territoires ». Dès la semaine prochaine, 162 communes (210.000 locaux) ferment en effet le cuivre à la commercialisation. Elle a réitéré l’impératif de respecter les critères définis par le régulateur (complétude FTTH, concurrence…) et rappelé que l’autorité pourrait décider d’un « report » si les communes proposées ne les remplissent pas.
Sur l’épineux dossier de la qualité de la fibre, Laure de La Raudière s’est voulue optimiste, voyant « une amélioration » dans la prise en compte par les opérateurs du plan qualité fibre de septembre 2022. Sur le New deal mobile, l’autorité va publier prochainement un bilan alors que le 2.500e pylône, soit la moitié de ce que prévoit le programme gouvernemental, a été inauguré l’automne dernier.
Redéfinir les priorités de régulation
Sur la sobriété numérique enfin, le chantier entamé par l’Arcep n’en est qu’à ses prémices. Au-delà de l’évaluation de l’empreinte carbone des réseaux, infrastructures et terminaux déjà réalisée, l’autorité va devoir se pencher sur les nouvelles pratiques. Elle a ainsi déjà pointé avec le Cnes et l’Ademe les conséquences potentiellement désastreuses pour l’environnement des « méga constellations satellitaires » en cours de déploiement dans le ciel européen. Elle va devoir aussi examiner de près l’impact de l’intelligence artificielle, particulièrement consommatrice en ressources.
La multiplication des missions confiées par le législateur à l’Arcep n’est pas sans conséquence sur sa stratégie et son organisation. Suivant les recommandations de la Cour des comptes (voir notre article), l’Arcep va entamer en 2024 un exercice de « revue stratégique » pour redéfinir ses priorités de régulation. Pour mémoire, le dernier exercice de cette nature avait abouti en 2016 à la mise en place de « la régulation par la donnée ».
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