La logistique chez Camif, c’est 15 000 références gérées, 140 fournisseurs référencés et 120 000 commandes expédiées en 2023. En 2024, l’entreprise se lance dans le BtoB et crée un programme de fidélisation client. Des chantiers importants pour le directeur des opérations Pierre-Yves Marteau et ses équipiers.
Comment orchestrez-vous la logistique de Camif et comment se présente ce premier semestre 2024 ?
L’équipe interne est composée d’une vingtaine de personnes toutes basées à Niort au siège de Camif, afin d’avoir une agilité et une réactivité maximales. Les flux logistiques s’organisent autour de deux principaux circuits de distribution. Le premier rassemble les produits correspondant aux références qui tournent le plus. Il représente la grande majorité de nos volumes. Le deuxième est du drop-shipping où les fabricants avec lesquels nous travaillons mettent à disposition la marchandise dans leurs usines tandis que nous affrétons un transporteur pour qu’il assure la livraison jusqu’au client. Pour les stocks, nous nous appuyons sur trois entrepôts : un site principal de 6 000 m2 situé à Vernouillet (28) et exploité par Log’s depuis un an. Y sont traités les produits encombrants (literie, canapés et mobilier). Nous avons ouvert un deuxième entrepôt pendant la crise Covid pour absorber le surplus d’activité avec notre partenaire L@D Logistics à Gellainville (28). Le site est spécialisé dans les meubles en kit. Le troisième et dernier dépôt est situé près de Niort, à Chauray (79), à côté de nos locaux. Il est géré par Stock AZ en multiclients. Cet entrepôt concentre nos activités de linge de maison, petite déco, donc des produits à faible encombrement.
En 2023, nous avons enregistré un léger recul de l’activité (- 5 %), en ligne avec la tendance du marché du mobilier de façon globale. Le premier semestre de 2024 semble plutôt se présenter de façon positive avec un retour à la croissance. Nous espérons que cela se poursuive.
Camif est une entreprise à mission. Comment cela se traduit au niveau de la supply chain ?
Cela nous oblige à avoir un modèle un peu différent. On ne peut pas jouer sur les mêmes effets de volume que de gros acteurs du secteur comme Ikea, La Redoute ou Maisons du Monde. Nous ne disposons pas de la même flexibilité concernant les marges puisque la plupart de ces enseignes s’approvisionnent en grande partie en Asie. Cela s’explique : nous travaillons exclusivement avec des partenaires français et européens. Sur le plan logistique, cela se traduit de façon concrète aussi. Nous choisissons des logisticiens et transporteurs locaux à taille humaine. Nous essayons de collaborer avec eux dans un accord gagnant-gagnant. Par exemple, StockAZ est notre partenaire depuis dix ans. Sur les délais de livraison, tout en étant performants, nous ne rentrons pas dans une course à la livraison la plus rapide. Ce n’est pas du tout notre objectif car c’est une source de pollution majeure. Transporter du vide est une incohérence. Par exemple, que ce soit pour de l’enlèvement ou de l’affrètement vers les transporteurs, nous préférons que le taux d’occupation de nos navettes soit maximal, quitte à allonger de quelques heures le délai de livraison du client. C’est quelque chose que nous pouvons leur expliquer depuis notre centre de service client qui est internalisé à 100 % et basé à Niort également.
Opérationnellement, avec l’arrivée de Log’s il y a un an, nous avons fait le choix d’un mode de stockage au colis et pas au produit, ce qui permet de valoriser au maximum les retours clients. Si la commande retournée est composée de plusieurs colis et que l’un d’entre eux est défectueux, on ne jette pas tout le produit, mais seulement une partie et on restocke le reste. De la même manière, nous pouvons renvoyer une pièce, en cas de défaut ou de SAV à assurer. Nous ne renverrons pas un produit complet, mais un seul colis. Nous avons besoin de cahiers des charges fabricants un peu plus précis pour pouvoir le faire mais le plus important est d’avoir un système informatique qui le permette. Sur le plan des flux, c’est cela qui a été un vrai défi à relever. C’est en place depuis trois ans chez L@D Logistics. C’est aussi opérationnel depuis un an avec Log’s, ainsi que dans notre dépôt principal de Vernouillet.
Comment gérez-vous les retours produits ?
Une autre réalisation dont nous sommes fiers, c’est justement la solution de valorisation des retours que nous avons construite avec SmartBack à l’automne 2022 (1). Cela commence d’ailleurs à se démocratiser avec d’autres acteurs qui s’y mettent comme Alinea et Vente-Unique. com. Mais avant que l’on ne débute cette collaboration avec SmartBack, nous avions déjà mis en place des solutions de revalorisation et de recyclage au sein de nos entrepôts. Nous procédions au reconditionnement des articles et nous proposions déjà à nos clients des produits de seconde main à un prix attractif. Mais notre souhait était de progresser pour améliorer deux points : la lutte contre le transport inutile et les efforts en faveur de l’économie circulaire et du réemploi. Concernant le premier point, il n’y avait pas forcément d’intérêt à faire revenir un produit dans nos dépôts alors que nous risquions de ne pas pouvoir le valoriser. Le deuxième point a nourri notre collaboration avec SmartBack. Désormais, tout article qui ne peut être réintégré dans nos stocks va être transmis à un acteur local. Et quand on dit local, on parle d’un rayon de 25 kilomètres autour du domicile du client chez lequel le produit est repris pour être soit revendu, si possible, soit transmis à un réparateur, une recyclerie ou une association, toujours dans le même périmètre environnant. En 2023, plus de 500 retours leur ont été confiés, ce qui représente une part importante de la quantité traitée.
Le monde de l’emballage est-il assez innovant pour soutenir vos efforts en matière de durabilité ?
Nous avons en tête un objectif cible à zéro plastique, zéro matériau en mousse expansée par exemple. Nous n’allons pas y arriver en quelques mois, cela va prendre du temps. Mais aujourd’hui, nous avons avancé sur ces sujets. Par exemple, 40 % de notre offre de produits de linge de maison est déjà sans emballage. Il y a juste une cordelette. Toujours pour les petits produits, nous avons été parmi les premiers à proposer des emballages réutilisables avec les enveloppes Hipli qui peuvent faire jusqu’à une centaine de rotations. Cela permet d’économiser de la matière brute. Notre ambition est de déployer l’offre sans emballage sur presque toute notre gamme de petits produits.
L’intelligence artificielle a-t-elle sa place dans votre logistique ?
Depuis trois ans, nous utilisons l’IA au sein de notre outil de prévision des ventes et d’optimisation des stocks qui s’appelle Flowlity. Sa mise en oeuvre avait pour but d’aider nos équipes à se concentrer sur les produits, les fournisseurs à forts enjeux et de laisser les algorithmes piloter les références à plus faible rotation, tout en gardant toujours un oeil dessus évidemment pour s’assurer que tout est correct. Par ailleurs, certains de nos transporteurs se servent aussi de l’intelligence artificielle pour optimiser leurs tournées afin d’être plus efficaces et réduire le nombre de kilomètres parcourus et donc les consommations de carburant.
Quels grands jalons organisationnels ont marqué 2024 ?
En mai, nous avons internalisé tout notre service client qui était auparavant sous-traité en partie auprès de Teleperformance. Nous l’avons fait afin de créer du lien et de la confiance avec les clients. C’est une vraie force. Nous avons récemment changé d’ERP en migrant vers une solution plus pérenne, avec plus de fonctionnalités et plus de performances. L’idée était de fiabiliser notre base de données, nos échanges de flux et de pouvoir profiter de nouvelles fonctionnalités comme le partage d’extranet avec nos fournisseurs de drop-shipping. Ceci afin d’avoir une actualisation des délais en temps réel et de pouvoir mesurer les performances de nos fournisseurs et transporteurs.
Quels projets stratégiques sont à l’ordre du jour ?
Nous avons lancé une offre BtoB (bureaux, télétravail, gîtes et hôtelleries). L’idée est de proposer aux acteurs BtoB des produits respectant les mêmes valeurs que ceux que nous commercialisons auprès du public BtoC, à savoir des produits de qualité faits en France et dans le reste de l’Europe. Cela a représenté un gros travail de sourcing fait par notre équipe offre, mais cela a des conséquences sur notre métier car les commandes sont beaucoup plus volumineuses et partent, la plupart du temps, de plusieurs points d’expédition. Cela nécessite par conséquent un suivi fin, des étapes de contrôle pour s’assurer que tous les produits seront bien livrés au même moment au client final avec de nouveaux partenaires de transport et de montage spécialisés dans cette activité axée BtoB.
En parallèle, nous continuons de déployer notre feuille de route avec de nouvelles solutions de livraison et d’expérience client. Nous travaillons sur une prise de rendez-vous transporteur lors du check-out et la mise en place de points relais pour les produits encombrants, ce qui constitue une vraie alternative pour les personnes qui n’ont pas forcément la possibilité d’être chez elles en semaine. Nous planchons sur la création de nouveaux services comme la réparation de produits que nous voulons promouvoir pour une meilleure durabilité. Sur la partie stocks, nous devons améliorer la disponibilité et la maîtrise des délais. Enfin, côté service client, nous voulons lancer un programme de fidélisation avec comme objectif d’avoir encore plus de liens avec les clients qui nous font confiance et qui adhèrent pleinement à notre démarche. L’image de marque de Camif est forte. Notre NPS est à 70 depuis maintenant presque un an et nous souhaitons remercier nos clients pour cela.
(1) Camif et SmartBack ont remporté le Bronze en catégorie Supply Chain aux Trophées E-Commerce 2023
Son parcours
2012 Pierre-Yves Marteau intègre la société Asymptote Project Management (devenue entretemps Parlym Project Management) en tant que consultant Project Management Office (PMO).
2015 Il est recruté par l’enseigne de distribution, d’ameublement et de décoration Maisons du Monde comme ingénieur supply chain.
2019 Il rejoint Camif, entreprise de commerce en ligne spécialisée dans l’aménagement de la maison en tant que responsable supply chain.
2024 Il est promu au poste de directeur des opérations de Camif.
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