Dans la Loire, le territoire connecté est une réalité depuis 2020. En Vendée et dans le Val de Loire, les stratégies sont formalisées et les appels d’offres lancés. Des exemples très convergents dans leur ambition, détaillés lors d’un atelier à l’université d’été du THD, qui ont inspiré les conclusions du rapport de Valérie Nouvel sur les territoires connectés remis au gouvernement le 12 octobre 2023.
Des projets mutualisés
La première constante du territoire connecté est qu’il lui faut une taille critique et des partenaires solides. « Aucune petite collectivité n’est capable de porter le projet et le département nous semble la bonne échelle », fait valoir Philippe Guimbretière, directeur de Vendée numérique. C’est ainsi que le GIP qui a construit le réseau très haut débit départemental porte le projet « Vendée territoire connecté ». Le projet associe de manière informelle tous les acteurs départementaux de l’aménagement (eau, électricité), du numérique (e-collectivité, Géovendée, FrenchTech) ainsi que le conseil départemental et plusieurs EPCI. « Des acteurs qui ont l’habitude de travailler ensemble », souligne le directeur de Vendée numérique. Val de Loire numérique associe pour sa part deux départements (Loir-et-Cher, Indre-et-Loire), la région Centre-val de Loire et une vingtaine d’EPCI. Cet attelage a fait ses classes sur un service Wifi gratuit pour s’intéresser désormais à d’autres usages déployés avec l’appui des syndicats d’eau et d’énergie. Dans la Loire, la mutualisation souhaite dépasser les collectivités en proposant à des acteurs de l’intérêt général (association, Ephad…) la possibilité d’utiliser le réseau sans fil départemental pour déployer leurs propres services.
Des thématiques convergentes
Autre caractéristique du territoire connecté : des thématiques convergentes autour de l’eau et de la gestion de l’énergie et de l’environnement. « La relève des compteurs d’eau c’est notre killer application », affirme Philippe Guimbretière, l’objectif étant de déployer la télérelève sur la totalité du réseau, soit 400.000 compteurs, car « se limiter à 80 ou 90% du territoire n’aurait aucun sens ». Un usage qui à lui seul devrait rentabiliser les investissements nécessaires. L’eau est également au cœur du projet de la Loire avec pour différence qu’il compte d’ores et déjà 380 « passerelles » (points de collecte de données) actives. Jérémy Lambert, responsable du pôle numérique du Siel qui porte le projet Roc42, note aussi l’intérêt d’ajouter les capteurs d’air à l’offre territoire connecté « car c’est ce qui a suscité l’intérêt des élus ». La pleine adhésion des élus anime aussi Val de Loire numérique qui s’est du reste appuyé sur son réseau wifi pour un premier cas d’usage. Ses quelque 780 bornes Wi-Fi permettent en effet de mesurer précisément la fréquentation des 310 sites sur lesquels les bornes sont implantées. « Cela nous a permis de nous acculturer au cycle de vie de la donnée », souligne Olivier Legros, directeur du syndicat mixte. Dans le projet que finalise le syndicat ligérien, figurent ensuite l’eau (télérelève, mesure du niveau et des températures des cours d’eau), le suivi des consommations énergétiques des bâtiments ainsi que la télégestion de l’éclairage, une thématique également mentionnée par ROC42.
La technologie Lora plébiscitée
Dernière constante, la technologie Lora Wan – un réseau sans fil bas débit mais longue distance pour connecter tous types d’objets, y compris enterrés ou à l’intérieur de bâtiments – est plébiscité par les territoires dès lors qu’il s’agit de déployer massivement des capteurs. Dans la foulée des précurseurs comme Rennes Métropole, le Siel (Roc42), Vendée numérique et le SMO Val de Loire s’appuient sur cette technologie qui impose de mailler le territoire avec des émetteurs Lora. La « polyvalence », la « pérennité » et la « maturité de l’écosystème » sont vantées par des territoires qui, dans la continuité de leur réseau fibre, ont opté pour un réseau « souverain », maîtrisé de bout en bout. Si d’autres technologies sans fil sont aussi mentionnées par les industriels, elles restent cantonnées à des usages ciblés, plutôt urbains. On citera par exemple Toulon Provence méditerranée qui utilise un réseau radio Tetra pour gérer la police et la sécurité des écoles. Toulouse Métropole est pour sa part l’une des rares collectivités à s’être positionnée sur la 5G via le projet européen Hi5. Ce réseau couvrira 16 Km2 et promet d’expérimenter des usages dans le domaine de la culture, des transports, de l’énergie et de la recherche. Outre un écosystème 5G encore balbutiant, le prix des licences 5G, même revu à la baisse, s’avère de fait un sérieux frein à l’appétence des collectivités pour la 5G.
Convergence avec les industriels
La vision du territoire durable et connecté exprimée par la Vendée, la Loire et le Val de Loire recouvre largement celle du rapport remis par Valérie Nouvel au ministre délégué au numérique Jean-Noël Barrot à l’occasion de l’université du THD. L’élue de la Manche y ajoute cependant une préoccupation opérationnelle : faire converger les attentes des territoires avec l’offre des industriels afin de favoriser le passage à l’échelle des territoires durables et connectés. Au-delà de recommandations sur la planification et la limitation de leur périmètre à quelques usages ciblés (voir ci-dessous), l’élue invite à instaurer un « dialogue entre industriels et collectivités » dans le cadre de « plateformes d’innovation ». Elle insiste également sur la nécessité de « sortir de la logique des appels à projets » en garantissant une pérennité des financements et une assise des territoires connectés sur les obligations règlementaires telles que la rénovation énergétique.
Les quatre recommandations du rapport de Valérie Nouvel La mission conduite par Valérie Nouvel, vice-présidente du département de la Manche, a remis ses conclusions à Jean-Noël Barrot, ministre délégué au numérique et Dominique Faure, ministre déléguée aux collectivités territoriales. Ses propositions s’articulent autour de quatre axes : – planifier le déploiement des usages numériques en ajoutant un volet usages aux schémas régionaux d’aménagement et de développement durable du territoire (Sraddet), les régions étant garante de la cohérence des usages déployés. Il s’agit aussi d’aligner tous les documents centrés sur les usages comme les schémas de développement des usages numériques (SDUN) sur de mêmes objectifs ; – définir quatre chantiers prioritaires, en lien avec les industriels, autour de la transition écologique : éclairage public, gestion de l’eau, prévention des risques et rénovation énergétique des bâtiments. La mission recommande un conditionnement des financements de l’Etat à l’appartenance de ces projets à ces quatre priorités ; – doter l’ensemble du territoire français de jumeaux numériques territoriaux souverains à la maille du mètre coconstruit entre l’Etat et les collectivités. Un projet qui visera notamment à articuler ce jumeau avec les systèmes d’information géographiques et à rendre interopérables les couches de données associées aux quatre thématiques prioritaires ; – mutualiser le déploiement des usages numériques à l’échelle départementale, faciliter et simplifier l’achat public innovant et rendre éligibles les projets de territoire connectés au programme France Nation verte. |
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