Accélérée par la crise sanitaire et les enjeux de transitions professionnelles, la transformation du marchéde la formation fait naître de nouveaux acteurs issus de l’EdTech. Après une période de forte croissance, ces start-ups cherchent des investisseurs. Les levées de fonds se généralisent et exigent de nouvelles compétences.
Avec l’essor de l’Edtech, les levées de fonds font désormais partie du quotidien des entrepreneurs de la formation. Pour financer leur développement et leurs innovations, les start-ups ont besoin de réaliser ces opérations au cours desquelles des investisseurs apportent de l’argent frais en contrepartie d’une prise de participation dans leur capital. Jusque-là timide, ce mouvement s’est considérablement amplifié ces deux dernières années. En 2021, les levées de fonds ont atteint, en France, le chiffre record de 438 millions d’euros portées par de jeunes pousses comme OpenClassrooms et 360 Learning. Loin d’être anecdotique ce point de bascule annonce une nouvelle ère.
« La crise sanitaire a fait entrer l’Edtech dans le quotidien du monde du travail et accéléré la digitalisation. C’est une tendance de fond. On ne reviendra pas en arrière », assure Marie-Christine Levet, cofondatrice d’Educapital. La trajectoire de ce premier fonds d’investissement spécialisé dans l’Edtech confirme l’intérêt grandissant du private equity (capital-investissement) pour le secteur. Educapital vient de boucler son second tour de table à hauteur de 150 millions d’euros -contre 47 millions lors de sa création en 2017- et ses tickets d’investissement atteignent désormais 10 millions d’euros.
Si les start-ups françaises ne réalisent pas de méga-levées de fonds supérieures à 100 millions de $ réservées aux jeunes pousses américaines et chinoises, leurs tours de table varient de quelques centaines de milliers d’euros comme pour Remixt spécialisé dans les formations à l’inclusion à 30 millions d’euros pour la plateforme d’apprentissage Rise Up. La plupart d’entre elles cherchent, avec leurs nouveaux actionnaires, à « passer à l’échelle » (scale up) en renforçant leurs actifs technologiques et en développant leur activité y compris à l’international. Certaines visent le leadership.
Des start-ups ambitieuses
C’est le cas d’Edflex. Cette plateforme d’agrégation de contenus de formation en ligne créée en 2016 a su séduire de grandes entreprises. En mai dernier, ce « Spotify de la formation » boucle un tour de table de 12 millions d’euros. La start-up élargira ainsi son offre de formation en exclusivité via des partenariats avec des organismes de formation et cherchera à s’imposer sur le marché européen, dans un premier temps, puis outre-Atlantique dans deux ans grâce à une nouvelle levée de fonds.
La solution de gestion de la formation destinée aux responsables des ressources humaines Rise Up réussit, en 2022, une importante levée de l’Edtech française à hauteur de 30 millions d’euros. Gourmande en investissements, ses solutions innovantes s’appuient sur l’intelligence artificielle et s’articulent avec les applications type Microsoft Teams. La start-up ouvre des bureaux en Europe et vise, elle aussi, une position de leader.
Il faut dire que la concurrence s’aiguise sur ce segment de marché à la frontière entre la gestion des ressources humaines et de la formation. Après avoir collecté 20 millions d’euros en 2022, la plateforme de gestion des compétences Neobrain enchaîne les acquisitions se doter de nouveaux outils technologiques et accélérer son développement en France et à l’international. Sa dernière opération de croissance externe en juin dernier, lui ouvre les portes des États-Unis. « Avec Flashbrand, nous améliorons l’accessibilité de nos solutions grâce à une application mobile et ajoutant à notre offre le suivi continu de la performance et de l’engagement des salariés », explique Paul Courtaud, directeur général de Neobrain.
Des fonds d’investissements aux « family offices »
Ces ambitions de croissance attirent les investisseurs qui s’intéressent de plus en plus à ces start-ups innovantes de l’Edtech. Les entrepreneurs doivent apprendre à connaître le monde du capital-investissement longtemps étranger à celui de la formation professionnelle. Ils sont nombreux à faire appel à des mandataires pour les aider à cibler les fonds d’investissements selon leur profil, préparer leur dossier et engager les négociations. Cet univers de la finance s’organise autour des grandes étapes stratégiques de la start-up de l’amorçage, à la consolidation de son projet jusqu’à son passage à l’échelle (scale-up). A chacune de ces phases correspond un profil d’investisseurs. Dans l’Edtech française, derrière le pionnier Educapital, d’autres spécialistes se positionnent à l’instar de Brighteye Ventures.
Autre catégorie de fonds, les fonds d’investissement dit à « impact » trouvent dans la formation et l’éducation un terrain de jeu intéressant. C’est le cas d’Impact Partners ou du fonds de l’assureur Maif que l’on retrouve dans plusieurs tours de table. De plus en plus actifs, les « family offices » s’engagent auprès des jeunes pousses. Plus discrets ces fonds de gestion de patrimoine sont parfois liés à des stars de la tech comme Xavier Niel (Kima ventures) ou Jean-Stéphane Arcis (Wile Finance). Le choix de son partenaire est essentiel pour la start-up qui s’engage et doit rendre des comptes.
LE TOP 5 DES LEVÉES DE FONDS EN 2022
(source : https://edtech-capital.com) |
initialement publié pp. 26-27 du n° 1060 d’Inffo Formation, 15 au 30 septembre 2023
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